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14 déc. 2023

Comment Israël chasse le Hamas de Gaza, par Richard Kemp

Des frappes ciblées aux inondations des tunnels terroristes, les forces de défense israéliennes commencent à briser le Hamas. Mais il reste encore beaucoup de combats à mener.

Richard Kemp
J'étais à l'intérieur de la bande de Gaza hier et j'ai assisté à la destruction à l'explosif de deux tunnels terroristes par les ingénieurs de Tsahal à Shejaiya. Peu de temps après, dans le même secteur de la ville de Gaza, les FDI ont connu l'un des accrochages les plus meurtriers depuis le début de l'offensive terrestre : neuf soldats de la brigade Golani ont été tués lors d'un échange de coups de feu et de tirs d'explosifs avec des terroristes.

De violents combats se poursuivent au nord et au sud de Gaza, tant en surface que dans le vaste réseau de tunnels du Hamas qui, pour vous donner une idée de l'ampleur de la tâche, serait encore plus étendu que les 250 miles du métro londonien. Les tunnels ajoutent encore une dimension incroyablement redoutable aux combats urbains, qui comptent eux-mêmes parmi les environnements de combat les plus difficiles, caractérisés par des taux de pertes particulièrement élevés, surtout parmi les forces d'attaque.

J'ai visité ces tunnels : ils sont lourdement fortifiés, revêtus de béton et dotés d'un éclairage, d'une alimentation électrique et d'un système d'aération. Pendant deux décennies, ils ont été construits en utilisant d'énormes sommes d'argent, y compris de l'aide internationale qui aurait dû être consacrée aux infrastructures civiles, et en coûtant la vie à de nombreux habitants de Gaza, y compris des dizaines d'enfants envoyés sous terre pour y travailler.

Les entrées des tunnels se trouvent principalement à l'intérieur de maisons civiles, d'écoles, d'hôpitaux et de mosquées. Les terroristes les utilisent pour stocker des armes et des munitions, protéger les commandants et déplacer les combattants afin de déjouer les manœuvres des forces en surface. Certains ont été équipés de lourdes portes anti-explosion afin d'isoler des sections au sein d'un réseau interconnecté et de compliquer les assauts des troupes israéliennes.

Les Israéliens les cartographient depuis des années, à l'aide de capteurs aériens et satellitaires, y compris l'imagerie visuelle et le sonar, et ont mis au point de nouvelles techniques pour identifier leur trajectoire depuis le sol. Malgré tout, les forces de défense israéliennes sont loin d'avoir une vision complète de la situation, et le Hamas a tendu des embuscades aux troupes en surgissant de l'arrière dans des zones qui avaient déjà été nettoyées. On m'a montré un tunnel s'ouvrant sous une maison à Shejaiya, d'où un terroriste est sorti pour attaquer les troupes de Tsahal avec une roquette RPG quelques jours plus tôt.

Il est parfois possible de perturber les opérations du Hamas dans les tunnels en les effondrant et en bloquant les entrées et les sorties. Cela peut se faire depuis les airs, à l'aide d'explosifs au sol et de bombes éponge qui produisent une réaction chimique à expansion rapide qui forme un mur dur comme de la pierre.

Les FDI ont également expérimenté l'inondation de certains tunnels avec de l'eau de mer afin d'en expulser les terroristes. Il s'agit d'une technique inaugurée en 2015 par l'Égypte contre les tunnels du Hamas à sa frontière, mais son efficacité dans cette situation n'est pas encore totalement comprise et le processus risque d'être long. L'inondation n'est pas sans poser de problèmes, notamment parce que de nombreux otages israéliens sont probablement retenus sous terre. Il y a quelques jours seulement, les soldats des FDI ont récupéré les corps de deux otages du Hamas dans un tunnel de la ville de Gaza.

Dans la mesure du possible, les FDI évitent de pénétrer dans les tunnels et de s'enliser dans des combats aux conditions du Hamas. Les combats dans les tunnels sont extrêmement dangereux, comme les "rats de tunnel" américains et australiens l'ont découvert à leurs dépens lors de la guerre du Viêt Nam. À l'instar des Viêt-congs, le Hamas a piégé nombre de ses tunnels, les a équipés d'explosifs déclenchés à distance et a préparé des positions de tireurs d'élite dissimulés pour tuer les troupes de Tsahal qui avancent. Malgré ces risques, les Israéliens pénètrent dans certains tunnels lorsque cela est nécessaire, notamment pour sauver des otages, obtenir des renseignements des postes de commandement souterrains et cibler des chefs terroristes de haut niveau. Ils utilisent des soldats spécialement entraînés, des chiens, des robots et toute une série d'armes et d'équipements de surveillance conçus à cet effet.

L'avancée inexorable des FDI dans la bande de Gaza, tant en surface qu'en profondeur, a permis de réduire considérablement les tirs de roquettes sur Israël, car la liberté d'action des terroristes est réduite à néant. Cela dit, lorsque j'étais à Shejaiya, une volée a été lancée depuis le sud, mais elle a été abattue par le Dôme de fer israélien avant d'avoir pu quitter le ciel de Gaza.

La structure de commandement des terroristes commence elle aussi à s'effondrer à mesure que les principaux dirigeants sont tués, même si le chef du Hamas, Yahya Sinwar, et ses hommes de main restent probablement sous terre quelque part dans le sud, sans doute avec une sortie éventuelle prévue par des tunnels sous la frontière avec l'Égypte. Un nombre croissant de terroristes se sont rendus, ce qui est un signe encourageant pour le moral des troupes.

Mais il reste encore beaucoup de combats difficiles à mener et les alliés d'Israël devraient s'efforcer de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour démoraliser davantage le Hamas. Les accusations mensongères de Joe Biden contre Israël, hier, concernant les bombardements aveugles, ainsi que les allusions au fait que le soutien de l'Amérique commence à s'estomper, auront exactement l'effet inverse.

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Références :

Israel is flushing Hamas out of Gaza, traduction Le Bloc-note

par Richard Kemp, The Telegraph, le 13 décembre 2023

Le colonel Richard Justin Kemp CBE, né le 14 avril 1959, est un officier de l'armée britannique à la retraite qui a servi de 1977 à 2006. Kemp était commandant d'un bataillon d'infanterie. Il a notamment commandé l'opération Fingal en Afghanistan de juillet à novembre 2003. Après sa retraite, Kemp a coécrit Attack State Red avec Chris Hughes, un récit de la campagne d'Afghanistan menée en 2007 par le Royal Anglian Regiment. Kemp s'exprime aussi sur une série de questions sociales et politiques, notamment sur les forces armées britanniques, le Moyen-Orient et l'Union européen.